SSP 15 janvier 1998
"Jean a baptisé avec de l'eau, mais vous, c'est
dans l'Esprit Saint que vous serez baptisés sous peu de
jours" (Ac 1,5), telle est la promesse de Jésus
avant son ascension au ciel. Le baptême dans l'Esprit Saint
ou l'effusion de l'Esprit, selon la terminologie la plus courante
chez nous, est une grâce de Pentecôte qui a marqué
le 20e siècle et qui est sans nul doute l'événement
spirituel le plus important de ce siècle. Dans les Églises
chrétiennes de toutes confessions, nous pouvons compter
plus de 400 millions de baptisés dans l'Esprit et en 30
ans plus de 60 millions dans l'Église catholique. Si la
grâce fondamentale reçue et l'expérience spirituelle
qui en découle sont les mêmes dans toutes les confessions
chrétiennes, il y a toujours des divergences au sujet de
l'expression "baptême dans l'Esprit" et de son
contenu théologique.
L'explication théologique du baptême dans l'Esprit
la plus répandue chez les catholiques s'appuie sur les
recherches de K. McDonnell et G. Montague et nous pouvons la lire
en résumé dans le document "Raviver la flamme"
qui a été largement distribué dans les groupes
charismatiques. Le baptême dans l'Esprit y est présenté
comme l'appropriation personnelle des grâces reçues
dans les sacrements de l'initiation chrétienne: être
baptisé dans le Saint-Esprit et devenir enfants de Dieu
en recevant les sacrements de l'initiation chrétienne,
c'est une seule et même réalité. Dans Raviver
la flamme: "l'expression “baptiser dans l'Esprit”
s'applique à l'expérience chrétienne vécue
dans les sacrements de l'initiation chrétienne ainsi qu'au
réveil ou renouvellement ultérieur de cette même
expérience" (p. 7). Chez les premiers chrétiens,
être baptisés dans l'Esprit, c'était donc
se convertir à Jésus, recevoir le baptême
et la confirmation, être admis à la Table eucharistique,
recevoir l'imposition des mains avec la prière pour la
manifestation de l'Esprit et la réception des charismes.
JÉSUS, LE PREMIER BAPTISÉ DANS L'ESPRIT
Notre expérience de l'effusion de l'Esprit est à
l'image de celle de Jésus et de celle des apôtres,
donc à l'image du Jourdain et de l'expérience de
la Pentecôte. Pour mieux comprendre cette grâce et
sa place dans l'expérience spirituelle du chrétien,
il faut regarder l'expérience de Jésus et celle
des apôtres et mieux comprendre le Jourdain et la Pentecôte
en les comparant. Pour Jésus, il y a eu le Jourdain, suivi
du désert et de sa mission; pour les apôtres, il
y a eu le Cénacle, la Pentecôte et leur mission.
Le Jourdain, c'est la Pentecôte de Jésus et la Pentecôte
des apôtres, c'est leur Jourdain. De même l'expérience
du désert pour Jésus a son correspondant dans le
Cénacle, ces deux événements pouvant s'éclairer
mutuellement. Et tout est ordonné à la mission,
au désert comme au Cénacle, Jésus et les
apôtres se sont préparés à leur mission.
En Actes 1,4, au cours du repas qui précède l'Ascension,
Jésus enjoint aux apôtres de retourner au Cénacle
et d'y attendre ce que le Père avait promis avant de partir
en mission pour être "témoins jusqu'aux extrémités
de la terre".
On a très peu écrit sur la dimension sanctifiante
de l'expérience du Jourdain et de la Pentecôte.
Pour Jésus, l'onction de l'Esprit reçue au Jourdain
suivie des quarante jours au désert constitue pour lui
un chemin de croissance spirituelle. C'est dans la plus grande
humilité que Jésus au Jourdain se joint à
un groupe de pauvres de Yahvé pour y recevoir le baptême
de Jean. Cette humilité de Jésus, cet abaissement
volontaire (les théologiens diront "sa kénose")
plaît à Dieu son Père, de même que sa
prière, probablement une prière faite à haute
voix devant la communauté, comme nous en trouvons une dans
la bouche de Jésus en Mt 11,25. Alors les cieux s'ouvrent,
l'Esprit descend et le Père répond à Jésus
en lui disant: "Tu es mon Fils bien-aimé, tu as toute
ma faveur". Jésus fait alors l'expérience de
l'amour personnel du Père pour lui. Tout récemment,
en novembre 1997, Selon Sa Parole a publié un article du
père Yvan Paul nous présentant le baptême
de Jésus comme une expérience qui l'a transfiguré,
il met l'accent d'une façon toute particulière sur
la révélation de l'amour personnel du Père
pour Jésus: "Jésus a pris conscience de sa
vocation de faire connaître à tous cette proximité
de Dieu. Tout son enseignement, toutes ses paroles, tous ses actes,
jusqu'à la mort, porteront ce message. C'était sa
mission de Sauveur."
Le désert est un temps d'intimité avec le Père, où Jésus se nourrit, médite les paroles et les promesses de Dieu pour mieux comprendre sa mission; c'est aussi le temps du combat spirituel où il rencontre le Tentateur et se mesure aux forces du mal qu'il devra combattre. Les armes employées par Jésus contre le Tentateur sont l'adoration, la méditation de la Parole, la solitude et le silence, le dénuement et le jeûne.
Le Jourdain et le désert débouchent sur la mission
de Jésus et c'est là que nous constatons les fruits
spirituels et les effets charismatiques de l'onction reçue
au Jourdain. La mission de Jésus nous fait voir son amour
du Père, une obéissance sans réserve à
sa volonté, le don total de lui-même jusqu'à
la mort sur la croix. Dans sa mission, nous voyons tous les charismes
à l'oeuvre d'une façon exceptionnelle: à
Nazareth, il se présente comme celui qui a reçu
l'onction de l'Esprit promise par le prophète Isaïe,
il réclame un ministère de puissance dans la lignée
des prophètes Élie et Élisée, il est
porteur d'une onction pour proclamer la Parole qui fait dire
aux auditeurs: "Jamais un homme n'a parlé comme cet
homme." Tous les autres charismes aussi vont se manifester
en Jésus: la prophétie, la science, la parole de
sagesse et de connaissance, la foi, le discernement.
LA PENTECÔTE DES APÔTRES
Les 10 jours passés au Cénacle avec Marie et
les disciples dans l'attente de la réalisation de la promesse
de Jésus ont été un temps de prière,
de réflexion et d'approfondissement des enseignements laissés
par Jésus. À Nazareth, alors que Marie était
en prière, l'Esprit Saint est venu la couvrir de sa puissance
pour qu'elle enfante et devienne la Mère du Sauveur; au
Cénacle, au coeur de la prière de la petite communauté
réunie à l'entour de Marie, l'Esprit est descendu
donner un souffle de vie à l'Église naissante. Ce
fut pour les apôtres un événement à
la fois sanctifiant et charismatique.
Il importe de souligner les fruits spirituels que nous trouvons
chez les apôtres au lendemain de la Pentecôte. Au
moment de l'Ascension, Matthieu signale que plusieurs encore doutaient
et les questions posées en Actes 1,6 montrent bien que
la vraie mission de Jésus était encore comprise
d'une façon toute charnelle; la Pentecôte apporte
aux apôtres une grâce d'illumination qui leur fait
découvrir la personne de Jésus et comprendre ses
enseignements. En bref, il faut signaler chez les apôtres
une vigueur toute particulière des vertus théologales:
une foi indéfectible en la résurrection de Jésus,
une espérance invincible au milieu des persécutions,
un amour de Dieu qui les fait marcher sur les pas de Jésus,
tout quitter et tout donner pour Jésus et l'Évangile
en allant même jusqu'au martyre.
Dans la mission de Jésus comme dans celle des apôtres,
les manifestations charismatiques abondent et surabondent: tout
se passe dans la puissance de l'Esprit et la raison d'une telle
abondance, c'est la grâce de Pentecôte reçue,
c'est l'Esprit de puissance demeurant en Jésus et dans
l'Église. Les guérisons et les miracles, ces "oeuvres"
qui provoquent la foi constituent l'accréditation de Jésus
comme Messie et envoyé de Dieu: "Jésus, cet
homme que Dieu a accrédité auprès de vous
par les miracles, prodiges et signes" (Ac 2,22); ces mêmes
gestes de puissance vont accréditer les apôtres comme
envoyés de Jésus, le même Esprit qui était
en Jésus se retrouvant en Pierre et les apôtres,
puis en Étienne et Philippe, puis en Paul et Barnabé.
Les Actes des apôtres, ouvrage très charismatique,
rapportent guérisons et miracles, plusieurs moyens de conduite
extraordinaire par l'Esprit Saint: anges, visions, songes et révélations.
L'EFFUSION DE L'ESPRIT, PENTECÔTE DU 20e SIÈCLE.
La grâce de l'effusion de l'Esprit, reçue dans
nos groupes charismatiques, est un complément de notre
initiation chrétienne. Après des journées
de formation ou les séminaires de la vie dans l'Esprit,
(ce qui est notre désert ou notre cénacle), nous
pouvons demander de recevoir cette grâce. Elle est donnée
par Dieu en réponse à une prière faite par
les responsables pour demander le don de l'Esprit et la manifestation
des charismes; cette prière est accompagnée de l'imposition
des mains. Il y a une grande diversité des expériences
vécues lors de cette prière, en raison des personnes,
de leurs attentes et de leurs dispositions. La réponse
de Dieu à cette prière est certaine, mais imprévisible;
comme au Cénacle, il faut prier avec Marie et en Église.
Cette grâce de Pentecôte nous fait entrer plus profondément
dans le mystère trinitaire: avec l'expérience de
l'Esprit et de ses dons, nous pouvons entrer dans une connaissance
plus profonde du Père et de son amour personnel, une foi
raffermie dans le Christ et sa résurrection. Avec le don
de l'Esprit Saint, on peut recevoir un renouveau des grâces
du baptême et de la confirmation, une dévotion renouvelée
à l'Eucharistie et avec le temps on peut constater un merveilleux
développement des vertus théologales. S'il y a engagement
dans les groupes de prière, apparaîtront normalement
les charismes selon le don de l'Esprit.
L'effusion de l'Esprit revêt chez un grand nombre de
ceux qui la reçoivent les deux caractères suivants:
premièrement, elle est marquée par un enthousiasme
qui envahit toute la vie de la personne, comme une onction de
joie et d'allégresse spirituelle, un feu sacré
qui ne s'éteint pas, une grande espérance qui envahit
toute la vie; le deuxième caractère est la radicalité
qui place Jésus au coeur même de la vie du baptisé
dans l'Esprit et le pousse à un engagement durable qui
veut aller jusqu'au bout de l'Évangile et de ses exigences.
UN ÉVÉNEMENT SANCTIFIANT ET CHARISMATIQUE
L'effusion de l'Esprit doit être pour chacun de nous un événement sanctifiant et charismatique. Il ne faut pas oublier notre désert et notre cénacle, nous sommes moins enclins que lors des débuts à pourvoir à nos besoins d'approfondissement et de ressourcement. Notre cheminement dans le Renouveau doit nous conduire sans cesse vers une plus grande sainteté, nous faire entrer avec Jésus dans le combat spirituel et nous faire vivre des étapes de croissance spirituelle.
IL NE FAUT PAS OUBLIER LA MISSION
Notre mission est un engagement dans l'Église pour être
témoins de Jésus et de son Évangile, en paroles
et en actes, par toute notre vie. Allons travailler à la
vigne du Seigneur, allons avec les charismes de l'Esprit Saint
pour faire l'oeuvre de Dieu avec la puissance de Dieu reçue
en nous par les charismes. Notre mission doit prendre modèle
sur celle de Jésus et celle des apôtres: Jourdain,
désert et mission de Jésus; Cénacle-Pentecôte
et mission des apôtres. Expérience à la fois
sanctifiante et charismatique, la grâce de l'effusion de
l'Esprit nous fait marcher sur les traces de Jésus et
des apôtres dans l'enthousiasme et la radicalité
d'une vie chrétienne marquée par l'onction du Saint-Esprit.
NOTE D'AUTEUR
Le père Guy Jalbert, oblat de Marie-Immaculée,
est au service du Renouveau charismatique depuis 1973. Il réside
chez les Oblats au presbytère St-Sauveur, ville de Québec.
Missionnaire itinérant, il donne des sessions de formation
et participe à des congrès. Il est membre du Comité
de rédaction de Selon Sa Parole.
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Dernière mise à jour 27 janvier 1998