SSP 15 mars 1998

Selon sa Parole 15 mars 1998 vo. 24 numéro 3

CHRÉTIENS DANS L'ESPRIT, QUELLE ASCÈSE!
Claude Gagnon

Hier, le Seigneur a fait des merveilles, je les ai vues. Grâce à l'effusion de l'Esprit en moi, j'ai l'expérience de l'amour du Père pour les hommes. Comment l'oublierais-je? Aujourd'hui, malgré les témoignages dans mon présent, je ne sens plus sa présence divine. Hier, la lumière du Christ transfigurait mon regard. Je voyais la présence du Christ. Aujourd'hui, je regarde les yeux grand ouverts de mon coeur, je ne vois que succession fastidieuse de jours emplis de mille occupations, d'événements qui ne semblent guère respecter la liberté de l'homme que l'on ose à peine nommer vies humaines devant toutes sortes de misères. Même le groupe de prière m'ennuie, M'apparaît hors de la vie... Comment vais-je faire pour demeurer chrétien dans l'Esprit? Il faut voir au-delà des apparences avec le regard de foi. Ne plus agir selon mes impressions, mais selon ma foi, faire ce qui me convient non plus ce qui m'attire, me maîtriser. Nous appelons cela l'ascèse.

Le petit Robert la définit: "Ensemble d'exercices physiques et moraux." Cette ascèse païenne, volontariste et prétentieuse, mais au regard de l'Évangile elle est absolument stérile. Hélas, bien des chrétiens se sont imaginés que leurs mérites pourraient faire naître en eux un peu d'amour: chaque page de l'Évangile nous crie l'inverse. Les pharisiens soucieux de vertus et d'observance de la loi n'entrent pas dans le Royaume. La sainteté est un don de Dieu, jamais le fruit de nos efforts. Dans le Renouveau, nous constatons, nous l'expérimentons; si l'Esprit m'a envahi, je n'y suis pour pas grand chose, je l'ai seulement accueilli. L'ascèse chrétienne est celle qui naît de l'amour. Elle en est le fruit qui devient une nourriture fortifiante.

L'amour varie, mais si cet amour est fidèle, il conduit toujours à une certaine ascèse. S'aimer soi-même est très exigeant. Qui croit en soi s'imposera d'interminables veilles de travail pour obtenir un diplôme. Cela sera pour sa gloire. Qui aime son corps le soumet à une discipline afin qu'il garde sa forme. À l'opposé, qui se laisse vivre est quelqu'un qui ne s'aime guère. Qui aime la richesse se tue au travail. Qui aime la gloire, tels nos hommes politiques dans leurs campagnes électorales. Qui aime son métier ne compte plus les heures. Quelle ascèse que celle d'une mère da famille. Ne lui parlez pas de sacrifices, elle aime simplement. Qui aime le Seigneur ne peut s'empêcher, même s'il est fatigué, de passer un moment avec lui seul ou participer à la réunion de prière hebdomadaire quels que soient ses autres désirs.

L'ASCÈSE CHRÉTIENNE

Le Seigneur est premier. Je le fais passer avant toute chose. Les personnes, le travail, la nourriture, le sommeil, les amis. Qui aime ne manque ne manque pas ses rendez-vous d'amour, que le Seigneur me parle au coeur ou se taise, peu importe. Pour moi, je vérifie ma faim et ma soif du Seigneur, car il est mon vrai pain et l'eau vive que je préfère. Il est mon repos lorsque je suis près de lui.

Le désir du Seigneur passe avant le mien. Je connais le désir de Jésus à mon sujet. Il veut que j'aime les hommes comme il les a aimés avec son Esprit. Mon plaisir est de plaire au Christ. Parce que je l'aime, je me fais serviteur.

JE DOIS ÊTRE EN ÉTAT DE SERVICE

Cela est très exigeant. Cela m'oblige, c'est l'ascèse. Prendre soin de mon corps, le nourrir convenablement, lui assurer le repos, prendre des vacances, faire un peu de sport pour être bien dans ma peau, tenir compte de mes limites.

Me connaître tel que je suis sans voile. Faire la vérité sur moi-même, d'abord la Parole de Dieu qui est ma lumière. Je ne dois pas la censurer. Je me laisse interpeller par elle. Un frère ou une soeur peuvent m'aider dans l'accompagnement.

DÉVELOPPER MES TALENTS

Le Seigneur m'a fait des dons, il ne faut pas les cacher. Quelle ascèse que cette mise de mes charismes à la disposition de l'animation de l'assemblée de prière.

L'ACÈSE CHRÉTIENNE, NOURRITURE QUOTIDIENNE DU CROYANT ADULTE

"Je n'ai voulu rien savoir parmi vous, sinon Jésus-Christ et Jésus-Christ crucifié" (1 Co 2,2). Saint Paul déclare aux Corinthiens encore si peu chrétiens: "C'est du lait que je vous ai fait boire, non une nourriture solide; Vous ne l'auriez pas supportée. Mais vous ne la supportez pas davantage aujourd'hui, car vous êtes encore charnel" (1 Co 3,2-3). Ne ressemblons-nous pas à ces Corinthiens? Dans nos assemblées de prière, le Seigneur nous offre un breuvage merveilleux. Mais n'aspirerait-il pas à nous voir grandir dans la foi et prendre une nourriture évangélique. Goûtons donc les douceurs qu'il se plaît à nous offrit. Mais Jésus désire nous voir consommer le pain dont il s'est nourri. "Ma nourriture, c'est de faire la volonté de celui qui m'a envoyé et d'accomplir son oeuvre" (Jn 4,34). Tenté au désert, Jésus se nourrit de la Parole de Dieu. "A Gethsémanie, c'est la croix sa préférence. Celui qui ne porte pas sa croix et ne marche pas à ma suite ne peut pas être mon disciple" (Lc 14,27).

L'ASCÈSE CHRÉTIENNE, C'EST LA LOUANGE

Mais comment louer quand je perçois ce qui se passe dans le monde? J'ai plutôt envie de protester comme Job sur son fumier. Quand je vois les malades, les blessés, les tortures à tant d'humains, le chômage et son cortège de misères. Le louer ne serait-il pas de l'Hypocrisie? Pourtant la foi me donne la certitude que Dieu est digne d'être adoré. Il est digne et juste de te rendre grâce en tout temps et en tout lieu, chantons-nous joyeusement. Qui connaît le Père, le Fils et l'Esprit ne saurait en douter. L'amour enveloppe la plus abîmée de ses créatures. Nous sommes sa demeure trinitaire pour l'éternité. Voilà pourquoi dans la louange, je passe de l'ignorance méfiante ou du mensonge à la vérité. Le mensonge, ce sont nos lamentations, nos airs déprimés, nos gémissements qui manifestent notre peu de foi et d'espérance. Ma révolte devant la souffrance, ma peur des séparations, mon incompréhension devant la mort révèlent l'infirmité de mon amour du Seigneur. Par la louange je m'affirme fils du Royaume. Un fils du Royaume garde dans son coeur les paroles de l'Écriture comme les vieilles gens qui murmurent, Dieu soit béni ou que le Seigneur est bon. Dans le Renouveau nous redécouvrons ces cris du coeur habité par l'Esprit. Prier son chapelet pour beaucoup de chrétiens est un mode d'ascèse. Le coeur épouse les attitudes de marie face aux événements. Cet incessant murmure intérieur ne peut que nous aider en toutes circonstances: "Le Seigneur a fait pour moi des merveilles, saint est son nom." Cela est vivre sur terre une ascèse en demeurant dans la Trinité.
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NOTE D'AUTEUR
Claude Gagnon est membre de la communauté des Frères de l'Education chrétienne. Depuis 1969, il est missionnaire au Cameroun. Il a enseigné la mécanique automobile à l'Ecole professionnelle. Membre du Renouveau charismatique depuis 1974, il a fondé trois groupes de prière au Collège De La Salle à Douala, Cameroun.
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Dernière mise à jour 25 mars 1998