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Magazine SELON SA PAROLE (QUÉBEC)
traitant de questions reliées à la spiritualité, l'évangélisation, l'éducation de la foi et la vie en Église
Selon Sa Parole 15 février 1999 vol. 25 numéro 2
Entrée en matière
Jeunesse et vieillesse: un persistant paradoxe
Gérard Filion
"Une vie sans tache compte pour vieillesse", affirme la Sagesse (Sg 4,9). "Mieux vaut un adolescent sage qu'un roi vieux", ajoute l'Ecclésiaste (Qo 4,13). L'auteur du livre de Job se pose enfin la question: "D'où vient que les méchants vieillissent?" (Jb 21,7). Ce jeu de l'Écriture autour de la jeunesse et de la vieillesse invite à approfondir notre jugement sur le couple vieillesse-jeunesse, à nous situer dans ce but bien au-delà des apparences, bref à débusquer le paradoxe qui s'y dissimule.
Jean Guitton, philosophe bientôt centenaire, pense que "la vieillesse est, comme l'enfance, un âge métaphysique par la disproportion qu'elle présente entre la faiblesse du corps et l'énergie de l'esprit" (La justification du temps). Au lieu de "métaphysique", parlons ici de psychologie et de spirituel. Si vieillir, ce n'est pas mûrir au plan des valeurs; si ce n'est pas attendre un meilleur équilibre du jugement et une certaine maîtrise de soi; si ce n'est pas pouvoir compter sur le poids d'une solide expérience - "La couronne du vieillard, c'est une riche expérience" (Si 25,6) - et révéler une incapacité croissante de "jeter la première pierre", alors, c'est là vraiment vieillir au sens le moins favorable, c'est déboucher sur la sénilité de l'esprit et du coeur.
"Je ne vieillis pas, disait Lacordaire, je connais seulement plusieurs jeunesses successives." Connaître au fil du temps une constante jeunesse, ne serait-ce pas, comme disait Jésus à Nicodème, renaître à la "vie", laisser s'augmenter la vie intérieure par un silencieux progrès de la qualité? Considérons les leçons de la nature: la jeunesse de la semence, ce n'est pas avant tout son état initial, mais bien l'épi mûr qui se balance au faîte de la tige.
Me pardonnera-t-on le rappel d'un souvenir personnel? Ma mère est décédée à 98 ans et 8 mois. Après avoir élevé quinze enfants, elle a passé les dernières années de sa vie souvent et volontiers retirée dans une petite chambre chez sa fille. Parvenue à cet âge, ma mère jeûnait, le dimanche matin pour réparer l'indifférence de ceux qui autour d'elle n'allaient pas à la messe et elle priait de manière assidue agenouillée sur un prie-Dieu. Un jour, en raison de la faiblesse de ses hanches, elle roula en bas du prie-Dieu. Mon beau-frère, après l'avoir sermonnée, lui enleva son précieux appui. Sans se laisser décontenancer, elle continua de prier à genoux sur le plancher de bois!
Ainsi retirée, elle était loin de connaître le monde en détail, mais son intuition lui faisait dire: "Le monde ne se convertit pas."
Triste et plaignarde, ma mère? Au grand jamais. Elle avait un humour vif et inoffensif. Elle aimait la plaisanterie et la taquinerie. Elle riait comme une enfant.
Je ne prétends pas évoquer ici une exception. Elles sont nombreuses ces personnes âgées au coeur jeune et encore et toujours ouvertes à la vie, remplies d'une foi et d'une espérance rayonnantes et dont le Christ prolonge l'existence pour contrebalancer, sauver tous ces coeurs vieillis prématurément par le désir de "jouir à plein de leur existence".
Les collaborateurs/trices du présent numéro soulignent chacun/e à sa façon les multiples aspects du "bien vieillir" et ils suggèrent en même temps les attitudes les plus saines qui doivent accompagner cette période de la vie.
Le père Valéry Vienneau joue sur le contraste évoqué par saint Paul: si l'homme extérieur va vers sa ruine, l'homme intérieur se renouvelle de jour en jour. Fort de cette idée, l'auteur propose aux personnes à la retraite des attitudes et des préoccupations tout entières tournées vers l'être intérieur, les valeurs spirituelles, la gratuité du service et l'accueil d'autrui. Très riche programme pour une retraite "productive".
Mme Marguerite Lescop raconte avec simplicité et originalité comment Dieu a intensifié son intimité avec elle. Ce témoignage ravivera chez plusieurs le souvenir de leur heureuse "seconde rencontre" avec le Seigneur.
Face à la vulnérabilité des personnes âgées, une attitude de foi à tenir pour contrecarrer l'angoisse et garder la santé mentale et spirituelle est l'abandon à Dieu. Ce geste de suprême importance est proposé dans deux interventions complémentaires, celle de Lucille Chamberland intitulée: l'abandon et la seconde qui est un commentaire sur l'invitation de saint Paul à "n'entretenir aucun souci" de Gérard Filion.
Sur quel fondement solide s'appuie l'abandon à Dieu sinon sur l'amour personnel qu'il nous porte? "Dieu t'aime" Une telle prise de conscience, grâce de choix du Renouveau dans l'Esprit, devient plus explicite et intense à la lecture de l'article tiré de la revue "Bonne Nouvelle".
Enfin la partie consacrée aux "témoins de notre temps" revêt une richesse et une force spéciales dans ce numéro. Le cheminement spirituel de Pierre Goursat, fondateur de la communauté de l'Emmanuel, illustre à quel point un laïc docile à l'Esprit peut contribuer à édifier une oeuvre d'Église des plus puissantes et des plus rayonnantes.
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Dernière mise à jour 18 février 1999
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