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Article de la revue de spiritualité SELON SA PAROLE, vol. 23,
15 mars 1997 pp. 16-17 Tous droits réservés
REPERES
L'EXPÉRIENCE DE LA CONTEMPLATION
Patrick Allaire
Tout discours sur la contemplation, et plus encore les contemplatifs, intrigue
nos contemporains. Plusieurs n'en ont pas la moindre idée. D'autres
croient que la contemplation n'est que regard dans le vide ou, au mieux,
regard vers ce que nous - simples priants - ne voyons pas. Qu'est-ce
donc que la contemplation? Est-ce accessible à tous?
La contemplation est pourtant la forme la plus profonde de la prière.
Nous la trouvons abondamment décrite dans les oeuvres de Jean de
la Croix, de Thérèse d'Avila, etc.). Selon ces experts en
spiritualité la contemplation dégage le priant de ses images
habituelles, de son système de pensées, de sa manière
de prier. C'est une prière où la présence à
Dieu supprime le dialogue, où une connaissance mystique remplace
l'effort de l'esprit et de la volonté. Dans la contemplation, on
parle plus de rencontre avec Dieu que de dialogue entre Dieu et nous.
LE CONTEMPLATIF EST UN VEILLEUR
Ce qui semble paradoxal dans la contemplation, c'est qu'elle soit habituellement
possible grâce à une discipline de prière et à
une méthode de prière, mais que celles-ci n'y conduisent
pas nécessairement. En effet, dès le moment où la
rencontre avec Dieu s'amorce, les facultés cessent d'agir, les méthodes
de prière déraillent. Le priant reconnait qu'il n'a plus
les commandes de sa prière, il ne prévoit même pas
le moment où la contact sera établi. En effet, le contact
avec Dieu vient nous surprendre au moment où nous ne l'attendons
pas. C'est un peu comme dans le texte de Marc (13,33-36) où le maître
annonce un retour imprévisible: "Veillez". C'est ainsi
à l'improviste, que revient le fiancé attendu par ses invitées,
celles qui avaient apporté de l'huile pour leur lampe et celles
qui ne l'avaient pas prévu.
LES CARACTÉRISTIQUES DE LA PRIÈRE CONTEMPLATIVE
Sans vouloir enfermer cette forme de prière dans un cadre rigide,
on peut en donner les caractéristiques suivantes.
La prière contemplative est faite de simplicité: il n'est
pas question de raisonner, de discourir avec Dieu; il suffit d'être
présent devant lui en toute confiance. La contemplation est faite
d'intuition et de spontanéité. C'est une relation avec Dieu
qui entraîne le priant dans une vue amoureuse des choses divines
et des choses de la foi. Elle communique à celui qui prie le regard
de Dieu sur la vie du monde, et les mystères de la foi. Cette façon
de voir, simplement et avec amour, est très importante.
Un autre trait de la contemplation c'est une sorte de passivité:
Ce n'est plus le priant qui a le contrôle de la prière. La
contemplation est comme une connaissance infuse qui ne demande pas d'action
mais qui exige d'être accueil, ouverture à Dieu et de durer
devant Dieu. Il n'y a rien à faire et si on voulait faire quelque
chose on perdrait le contact. C'est un peu comme lorsqu'on s'étend
confortablement dans les feuilles mortes, l'automne, et qu'on regarde les
nuages. Dès le moment où on veut changer de position, on
brise l'harmonie qu'on n'arrive jamais à retrouver. Dans le cas
de la contemplation, c'est Dieu qui a l'initiative, c'est lui qui vient
qui parle à l'âme. Ce n'est pas un senti psychologique mais
c'est un mouvement spirituel. Celui qui est ainsi en relation avec Dieu
ne peut pas agir Cette passivité n'est pas une paralysie, mais un
abandon à l'autre, abandon auquel il faut consentir.
Dernières caractéristiques, les réalités de
foi deviennent vivantes, réelles, palpables. Dans cet instant, il
n'est plus nécessaire de chercher à comprendre. Le travail
de la pensée est suspendu. Le connaissance de l'amour de Dieu est
ressentie de l'intérieur. Dieu devient quelqu'un, quelqu'un avec
qui on est bien, (sans faire plus). Dans une prière de contemplation,
les traités sur la Trinité, sur Dieu, sur le Salut, sur l'Incarnation
sont comme évidents et inutiles, le Seigneur étant là.
Dans la contemplation, Dieu devient se rend présent à l'âme.
Il est là.
UNE VISITE DU SEIGNEUR
Très simplement, je voudrais partager avec vous une expérience
personnelle. Maintenant j'y reconnais comme une visite du Seigneur.
"J'avais environ dix ou douze ans. J'étais couché et
je priais comme je le faisais chaque soir. C'est alors que l'idée
me vint de me trouver indigne de ci, de ça, indigne de prier même.
Je me répétais sans cesse mon indignité alors que,
petit à petit je commençais à louer pour ce qui est
si beau et si grand autour de moi. Déjà, je ne contrôlais
plus vraiment ce que je disais. Je ne maîtrisais plus l'orientation
de ma prière. Je me trouvai alors en pleurs, pleurs de peine à
cause de mon indignité, pleurs de joie à cause de ce que
je vivais. Je ne saurais dire si c'était peine, joie ou autre, non
pas à cause du temps qui me sépare de l'événement,
mais parce que dès ma sortie de cette contemplation, je n'aurais
pas su le dire. Je pleurais, mais ce n'était pas ce que je voulais.
En fait, je ne voulais rien.
Dans les pleurs, je vis un bonne et chaude lumière, comme si on
avait "allumé" dans ma chambre, comme si j'avais la lampe
directement orientée vers la figure. Pourtant, j'étais seul
dans l'obscurité. Toute la chambre était illuminée,
mais je ne voyais aucun meuble, aucun cadre, rien que du blanc. C'était
un peu comme dans un igloo aux parois plutôt minces sur lequel plombe
un soleil radieux. Il y avait comme un dialogue, mais sans parole. Il n'y
avait pas de bruit, pas de distraction et toujours régnait un état
de bien-être dans les pleurs.
On ne m'a donné aucune raison pour justifier cette visite, mais
ma mère descendit dans ma chambre et vint me voir. Elle "alluma"
certainement la lumière, car elle éclairait lorsque ma mère
sortit en l'éteignant. Dès qu'elle vint, ma mère me
questionna sur ce qui se passait, inquiète qu'elle était
de me voir triste ou malade. Je lui répondit spontanément
(ou c'est ce qui me sembla, car je crois que la question fut répétée)
"J'ai vu le Seigneur", en ces termes. Elle ne me crut pas et
me souhaita de dormir, de bien dormir, puis elle s'en fut." Si j'ai
accédé à la contemplation ce soir-là, à
vous d'en juger.
CONCLUSION
Ma conviction, c'est que la contemplation peut être accessible à
celui ou à celle qui consacre du temps à Dieu. Les exercices
peuvent mener à la rencontre de Dieu comme les efforts dépossession
de soi, de renoncement au contrôle de sa vie et de son âme.
L'âge adulte accentue la prise en charge de soi-même. Voilà
pourquoi il faut des exercices. L'enfant qui est souvent toute souplesse
et disponibilité n'oppose aucun obstacle à la visite de Dieu.
"Ayez une coeur d'enfant" nous dit le Seigneur. C'est tout simple
et je crois fermement, comme les mystiques que Dieu est prodigue de ses
dons et qu'il lance à tous des appels à la prière
et à l'abandon à sa volonté.
Voilà deux constantes qui ne trompent pas. La contemplation est
présence à Dieu dans l'abandon de l'amour.
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