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Magazine SELON SA PAROLE (QUÉBEC) traitant de questions reliées à la spiritualité, l'évangélisation, l'éducation de la foi et la vie en Église
Selon Sa Parole septembre-octobre 1999 vol. 25 numéro 7


CONVERSION D'UN CURÉ!
J. Jacques Petit

Votre demande de collaboration à la revue "Selon Sa Parole" m'a un peu surpris. Je n'ai jamais été un leader marquant au sein du Renouveau charismatique. Après tout, cet humble témoignage pourra peut-être apporter à l'Église, sa petite contribution. Que l'Esprit Saint m'éclaire et m'aide à dire l'essentiel!

Avec le Renouveau, pour moi, tout a commencé alors que je remettais en question mon cheminement sacerdotal et mon avenir dans l'Église. C'était à l'automne de 1973... j'étais au grand repos. Je venais de cesser de fumer alors qu'auparavant il me fallait brûler, chaque jour, un minimum de soixante-quinze cigarettes. Un tel changement a bouleversé toutes mes façons de faire... jusqu'à la nécessité de prendre un grand repos. Mille et une questions me poursuivaient constamment. La plus cruelle était certainement celle de mon avenir... dois-je laisser le sacerdoce ou faire confiance à mon vouloir d'être fidèle à la grâce de Dieu? Car si j'avais cessé de fumer c'était pour donner plus de qualité à mon travail sacerdotal. Je me savais esclave de la cigarette au point de nuire gravement à ma santé et en conséquence à tout mon travail sacerdotal.

Au plus creux de mon désarrois, je me suis souvenu qu'au Séminaire Saint-Paul, à Ottawa, entre nous, quelques séminaristes, nous avions prié pour que l'Église entre en Concile et qu'ainsi l'Esprit Saint puisse la renouveler en lui donnant un nouveau souffle de Pentecôte. Quelques années plus tard, quand Jean XXIII décida de tenir un Concile, ce fut pour moi une grande joie. Maintenant, en hiver 1973-74, environ dix ans après ce Concile qui brassait encore le monde entier, je me suis dit qu'il devait y avoir quelque part, dans le monde, des signes nouveaux et évidents de l'Action de l'Esprit. Je me suis rendu au Centre de Documentation pastorale à Montréal et j'ai fouillé toute la section des nouveautés en publications religieuses. Eurêka! J'ai trouvé un petit livre de l'abbé Henri Caffarel, intitulé "Faut-il parler d'un Pentecôtisme catholique?" Tiens, voyons-voir! Je regarde la première page. Le premier paragraphe commençait comme ceci: "Depuis quelques mois, la presse française parle beaucoup d'un "pentecôtisme catholique" aux États-Unis". Dés ce moment je sentis en moi comme une espérance! C'est peut-être ce que je cherche?!. Sans tarder, je l'achète. Je commence à lire tout de suite, tout en m'orientant vers le métro. Deux jours ont suffi pour me rendre à la fin de ce petit bouquin de quatre-vingt douze pages.

Imaginez! On y écrivait en page 45 que des étudiants et des professeurs catholiques de l'Université Duquesne de Pittsburg avaient fait l'expérience de soirées de prière en vue de recevoir l'effusion de l'Esprit Saint comme à la première Pentecôte. Dès les premières rencontres de prière, plusieurs d'entre eux avaient été transformés intérieurement. Puis, page 46, on y lit: Ainsi naît le "Pentecôtisme catholique" qui deviendra par la suite "Renouveau charismatique". Il se développe au grand jour dans l'Église des États-Unis. Des prêtres y entrent dès le début et établissent des liens avec la hiérarchie catholique".

Encore à la page 46 on lit ceci: En 1969, un rapport sur le mouvement pentecôtisme dans l'Église catholique aux États-Unis est présenté à la conférence épiscopale de ce pays. Dans ce rapport aux évêques des États-Unis, on y écrit que ce mouvement, entre autres caractéristiques importantes, a de solides bases scripturaires. La conclusion de la Commission doctrinale est que, dans l'état actuel des choses, il ne faut pas interdire le mouvement mais lui permettre de se développer.

Voilà qui semblait dépasser mes attentes. Tout de suite, à Montréal, je me suis mis à la recherche de traces possibles de ce mouvement. J'interrogeais des prêtres, des religieux et des laïcs. Puis quelqu'un m'a dit ceci: Chaque dimanche, dans l'après-midi, au Cégep de la rue St-Hubert, au nord du boulevard Métropolitain, beaucoup de gens se rencontrent pour prier. La rencontre se terminerait, parait-il, par la messe.

De retour chez moi je sentais grandir l'espérance à mesure que le jour du Seigneur approchait. J'ai trouvé facilement l'endroit. A l'entrée de l'immense salle se tenaient plusieurs curieux. Ils attendaient que ça commence. Étant donné que la salle était déjà presque remplie, je restai debout à l'entrée. Je ne voulais pas qu'on sache qui j'étais. Tout à coup, une dame qui m'était inconnue m'accosta en disant: Vous, vous êtes PRETRE! ça parait. Comme je ne voulais pas renier mon sacerdoce. Je lui ai dit: Oui, je suis prêtre, mais je ne suis pas venu ici pour faire du ministère. Je suis au grand repos. Finalement elle m'a conduit à un endroit discret, en arrière. De cet endroit je pouvais tout voir, entendre et percevoir que quelque chose d'indéfinissable se passait. C'était une atmosphère de prière joyeuse, pleine de respect. Les participants semblaient heureux, contents, et priaient sans respect humain. Au bout d'environ deux heures, une invitation fut faite à tous ceux qui le voulaient de se faire imposer les mains. Je ne me sentais pas prêt à cela. Je suis sorti, décidé d'y revenir.

Le dimanche suivant, j'étais au rendez-vous. D'un dimanche à l'autre je comprenais mieux ce qui se passait et je pouvais mieux discerner des signes de la présence de Dieu. Oui, l'Esprit de Dieu agissait dans les coeurs et y répandait sa paix. Toute personne de bonne volonté se sentait chez elle. Personne n'avait honte de manifester sa foi devant cette assemblée d'environ cinq cents personnes. Je n'avais jamais vu cela. Chacun se savait respecté de chaque participant. On pouvait, sans gêne, prier à haute voix, dans ses propres mots. De temps à autre, des personnes exprimaient leur joie et leur adoration en levant les mains. Je trouvais cela audacieux et adapté à notre époque. Dieu n'est-il pas Dieu, donc plus digne d'être applaudi et exalté qu'aucune autre vedette ou grand personnage.

En février ou mars 1974 j'ai demandé à recevoir l'effusion de l'Esprit. Un responsable laïque et quelques étudiants ont prié sur moi. Pendant une dizaine de minutes ils ont loué Dieu, prié avec simplicité, chanté avec coeur. En revenant chez moi, alors au presbytère Sainte-Madeleine, à Outremont, je ne me sentais pas du tout transformé, et pourtant... Pourtant j'étais en paix. Trois jours plus tard je me suis surpris à fouiller dans la Bible et à trouver cela plus intéressant que la télévision. En peu de jours, j'ai pris conscience que la Parole de Dieu devenait de plus en plus attrayante. Beaucoup mieux et plus facilement qu'auparavant je saisissais le sens de la Parole de Dieu. Je retrouvais le goût de la prière; le bréviaire n'était plus une corvée. Une espérance nouvelle m'envahissait. Je me sentais appelé à redire mon "oui" à ce Dieu qui me transformait avec tant de délicatesse, lentement par son Esprit Saint. Ma décision était prise. Je vais vivre mon sacerdoce en fidélité à l'appel de Dieu.

Cependant il y avait un mais. Quelque chose me chiffonnait. De toute évidence je demeurais un pécheur! Même si l'Esprit Saint me comblait de paix, d'espérance, je demeurais un être humain pécheur. Je ressentais encore davantage un grand besoin de conversion. Croyez-le ou non, je suis en cheminement de conversion depuis plus de vingt-cinq ans. Depuis l'année 1974, l'Esprit Saint m'a fait la grâce de plusieurs petites guérisons intérieures. J'ai pris conscience qu'il agissait en nous en tenant compte de notre fidélité. Je ne crois pas me tromper en disant qu'il respecte toujours notre liberté, et notre fidélité à ses appels. En plus clair, toute infidélité, petite ou grande, envers l'Esprit Saint, m'apparaît comme un non vouloir de ses faveurs. Comme je ne suis pas parfait, je suis toujours en cheminement de conversion. Il a encore beaucoup de transformations à opérer. Je n'ai jamais désiré une guérison intérieure complète et soudaine, trop magique. Cela m'a permis de prendre conscience, petit à petit, d'une grande vérité: l'Esprit Saint n'est pas un magicien. Il est Amour et lentement il m'apprend à aimer. Il procède avec respect, sans précipitation. Il me laisse le temps de saisir qu'il nous aime. Généralement, les signes qu'il me donne de son action sont humbles, sans éclat, si discrets que seule la foi peut me les faire voir. Durant mes vingt-cinq ans de cheminement sur la route de la conversion intérieure, j'en ai vu des petits signes de sa présence.

J'ai aussi pris conscience que notre conversion, ou guérison intérieure, ne s'opère pas sans notre collaboration. L'Esprit Saint ne peut nous guérir intérieurement que si, dans la pratique, nous y consentons. Consentir à notre guérison intérieure, c'est collaborer à l'oeuvre de l'Esprit Saint en nous. Collaborer à l'oeuvre de l'Esprit, c'est renoncer à tout ce qui nous détourne de Dieu. "Si le grain jeté en terre ne meurt pas, il demeure seul, mais s'il meurt, il porte beaucoup de fruit" (Jn 12,24). Mourir à soi-même pour faire toute la place au Seigneur, c'est le "oui" le plus vrai que l'on puisse dire à l'Esprit Saint.

C'est à cela que je m'applique depuis 25 ans. Comme personne ne respecte ma liberté autant que Dieu, je suis maintenant persuadé que toute ma vie durant je devrai travailler à ma conversion en permettant à l'Esprit Saint de me prendre, en main, de me "bardasser" autant qu'il le voudra. C'est un oui réfléchi, respectueux, sans cesse renouvelable aux appels de l'Esprit Saint. Je suis maintenant persuadé qu'en procédant lentement, l'Esprit Saint nous amène à le désirer ardemment et à nous convertir à son Amour. En nous convertissant à son Amour, Dieu notre Père nous veut heureux pour toujours... et il en tient compte quand il guérit. Il ne se contente pas d'une petite ou grosse guérison rapide, mais il guérit tout notre être, lentement, avec amour. Avec notre "oui", il agit lentement à tous les niveaux: physique, psychique et spirituel.

Une autre conviction grandit en moi. L'Esprit Saint semble inviter maintenant l'Église à se pencher sur la souffrance du monde. Depuis 1994, je suis semi-retraité. Je consacre un peu de temps à répondre aux urgences pastorales de l'hôpital, et semblablement au Foyer pour personnes âgées. Je vais de temps en temps prier dans un groupe de prière du Renouveau. Que ce soit au Centre de Santé, au Foyer, ou ailleurs en pastorale, je suis étonné de l'ampleur de la souffrance. Elle se manifeste à tous les niveaux d'âge, spécialement celle qu'on pourrait appeler: souffrance psychique. Les familles brisées me semblent être une cause épouvantable de souffrance morale et psychique chez les enfants.

Un tel constat de souffrance, m'a amené à réviser mes attitudes pastorales depuis 25 ans; en paroisse, à l'école, puis comme conseiller en éducation chrétienne. Sachant maintenant que toute personne, enfant ou adulte, porte en elle tout un contexte de vie qui l'a façonné, je suis de plus en plus capable d'accueillir qui que ce soit en respectant ses façons de faire et ses attitudes parfois agressives. Bref, mon activité pastorale au sein de l'Église est en train de donner à mon amour du prochain une qualité d'action qui lui manquait. Petit à petit, le renouvellement de mon attitude d'accueil pastoral se bonifie. Auprès des malades, je me sens de plus en plus à l'aise, heureux de les aimer tels qu'ils sont. Il est vrai que j'ai toujours été capable d'écoute des autres. Mais, maintenant, en le faisant, je n'ai plus l'impression de perdre mon temps. Ma souffrance est de ne plus avoir la santé voulue pour accueillir toute personne qui en fait la demande.

C'est peut-être ce qui explique en partie le projet que je suis en train de mettre sur pied avec l'aide d'un Groupe de prière de Val d'Or. Suite aux expériences de Liturgie de prière de guérison vécues lors d'assemblées des Répondants diocésains, de sessions ou retraites dans notre diocèse, nous sommes en train de mettre sur pied une petite liturgie de "Prière de libération". Pour apprendre à vivre l'amour du prochain jusque dans l'âme, chaque participant prie pour les autres. Chacun peut compter sur la prière des autres. Lors de la prière avec l'imposition des mains, là on prie spécifiquement pour chaque personne en particulier.

Il nous apparaît très important de nous pencher non seulement sur la santé physique mais également sur la santé psychique et spirituelle de la personne. Aux personnes qui ont commencé de venir, on suggère de se prendre en main en cherchant à entrer dans le projet de Dieu. C'est bien beau de prier pour la guérison physique, mais l'Esprit Saint ne joue pas au magicien. Il veut nous aider à trouver un sens à notre vie humaine. Pour nous, de foi catholique, nous sommes appelés à la vie en plénitude dans le Royaume des cieux. Notre souffrance est très précieuse si on apprend à la vivre.

Voilà où j'en suis rendu. Ma conversion se continue. Je tiens à remercier toutes les personnes qui m'ont aidé à me prendre en main sur le chemin qui conduit à la vie en plénitude. Gloire et louange à Dieu qui nous aime tant!

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Dernière mise à jour 2 août 1999

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