SSP 15 novembre 1997

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LE JOURDAIN: UNE EXPÉRIENCE QUI TRANSFIGURE

Ivan Paul

"Jésus, unique Sauveur du Monde, hier, aujourd'hui et à jamais": voilà le thème pour l'année 1997 en préparation au Jubilé de l'an 2000.

À Montréal, nous avons eu un congrès pour la Pentecôte, et là aussi, nous avons fêté notre jubilé: 25 ans du Renouveau charismatique dans notre diocèse.

Nous avons vécu de beaux souvenirs, spécialement ceux du stade Olympique avec leurs enseignements, leurs conversions surprenantes, la manifestation de la tendresse de Dieu, la participation de plus de 1000 prêtres et toutes les grâces cachées que nous portons encore dans le coeur.

Jean-Paul II nous suggère un regard renouvelé sur le Sauveur dans son encyclique "Tertio millenio adveniente". Au no 40, il nous invite à une lecture renouvelée de la Bible, spécialement de l'évangile de Luc, l'origine de la "vie publique" de Jésus. L'encyclique nous invite aussi à revoir, à clarifier notre "vision" de Jésus à la lumière de l'Église.

Face aux sectes, au Nouvel Age, à toutes sortes de journalistes qui jouent aux théologiens avec des articles, ou même des livres entiers sur Jésus, certains sont un peu perdus. Il n'y a rien de nouveau: tout au long de son histoire, l'Église a dû lutter contre des tendances à ne voir en Jésus qu'un homme inspiré, sans plus.

L'Église nous a toujours enseigné que Jésus est entièrement Dieu et entièrement homme, avec les limites de la nature humaine, avec ses besoins de tout apprendre, de faire des expériences.

IL CROISSAIT DEVANT DIEU ET LES HOMMES

Comme le dit le Catéchisme catholique (no 472), le Fils de Dieu a pu accepter en se faisant homme de "croître en sagesse, en taille et en grâce" (Lc 2,52) et même d'avoir à s'enquérir sur ce que dans la condition humaine on doit apprendre de manière expérimentale. Cela correspondait à la réalité de son abaissement volontaire dans "la condition d'esclave" (Ph 2,7).

Avec cette optique en tête, on peut voir Jésus se développant dans un milieu d'"anawim", les pauvres de Yahvé, recevant des enseignements d'abord et avant tout de ses parents, des exemples qui l'ont formé.

Jésus a grandi dans la tendresse de son Père et il a cette relation avec Dieu. Cela s'est fait progressivement sous la conduite de l'Esprit Saint.

LE BAPTÊME DE JÉSUS

Un jour, il partit rejoindre Jean-Baptiste dans le désert. Il était là, au milieu d'eux, faisant partie de ce peuple, se fondant parmi les "anawim" (cf. Mc 1,5; Lc 3,12-13).

Nous avons tendance à voir baptême de Jésus comme un acte individuel: Jésus seul, debout dans le Jourdain et Jean lui versant l'eau sur la tête, et le peuple autour, regardant la colombe et captivés par la voix. Les choses se sont probablement passées autrement. En lisant les évangiles avec soin, on peut voir que c'était un acte communautaire, un baptême collectif. Luc nous dit: "Comme tout le peuple était baptisé, Jésus, baptisé lui aussi, priait" (Lc 3,21).

On n'a pas assez remarqué cette dimension communautaire du baptême de Jésus. Et pourtant, elle est essentielle: Jésus fait partie du peuple, il vit la réalité du peuple, son attente, son espérance d'une libération. Il veut être entièrement avec eux et par là se préparer à la mission que le Père veut lui confier.

Et c'est au moment où Jésus vient d'être baptisé qu'il se passe quelque chose. Les évangélistes le racontent avec des mots qui s'inspirent d'Isaïe. Ils veulent ainsi souligner la réalisation du dessein de Dieu. Marc dit: "Au moment où il sortait de l'eau, il vit le ciel s'entrouvrir et l'Esprit, comme une colombe, descendre sur lui. Et des cieux vint une voix: "Tu es mon Fils bien-aimé, il m'a plu de te choisir" (Mc 1,10-11).

D'une façon plus sobre encore, Luc dit: "Jésus baptisé lui aussi (donc avec d'autres), priait et pendant qu'il priait... l'Esprit Saint descendit sur lui comme une colombe et une voix vint du ciel: "Tu es mon Fils, en toi je trouve ma joie" (Lc 3,21-22).

Les symboles traduisent chez Jésus une expérience spirituelle pendant qu'il prie. Il ne s'agit pas d'un spectacle pour la foule. C'est Jésus qui a une révélation, qui découvre la tendresse du Père avec la douceur d'une colombe qui vient se poser "comme une rosée descend du ciel", chantons-nous dans nos soirées de prières. La parole s'adresse à lui.

JÉSUS AU DÉSERT

Comment Jésus a-t-il vécu tout cela? Rempli de cette présence du Père, Jésus est allé s'isoler au désert pour intérioriser tout cela. Et le tentateur n'a pas manqué de l'y poursuivre, le forçant à faire un choix.

En lisant entre les lignes, on peut voir que Jésus a eu, en cet instant après son baptême, une révélation que son élan filial vers le Père n'est que la réponse à un mouvement encore plus fort du Père vers lui et vers ses frères et ses soeurs humains. C'est la découverte du Père, un Père qui veut se faire proche de son peuple au milieu duquel Jésus a voulu être pleinement homme.

JÉSUS RÉVÉLATEUR DU PÈRE

Il s'agit d'une expérience transformante qui a orienté toute la vie de Jésus. C'est précisément à ce moment-là qu'il commence sa "vie publique". Il a pris conscience de sa vocation de faire connaître à tous cette "proximité" de Dieu. Tout son enseignement, toutes ses paraboles, tous ses actes, jusqu'à la mort, porteront ce message. C'était sa mission de Sauveur.

Nous parlions au début de cet article de "beaux souvenirs" des débuts du Renouveau charismatique. Ne peut-on pas comparer cette espérance de Jésus à l'effusion de l'Esprit que tant de nous ont vécue... une expérience bouleversante qui nous a transfigurés. Beaucoup y sont restés fidèles, d'autres... moins! Nous sommes sauveurs avec Jésus, en lui.

Nous avons été un peu trop habitués à voir dans la notion de sauveur une idée de sacrifice. Le message que Jésus reçoit sans nier cet aspect semble différent. Sinon, pourquoi Jésus aurait-il commencé par chasser les vendeurs du Temple avec tout ce qui tournait autour des sacrifices? Le temps des sacrifices est révolu. Pourquoi chercher à s'approcher de Dieu, à marchander avec lui, alors que c'est lui qui cherche à s'approcher de nous?

AMOUR DU PÈRE ET ROYAUME DE DIEU

À un maître de la loi qui avait répondu que l'amour valait mieux que tous les sacrifices, Jésus a eu ces mots révélateurs: "Tu n'es pas loin du Royaume de Dieu" (Mc 12,34). Tout l'Évangile prend sa source dans cette expérience vécue profondément par Jésus au moment de son baptême.

LE BAPTÊME DANS L'ESPRIT

Jean avait eu par l'Esprit Saint la révélation du rôle de Jésus: "Moi, je vous baptise dans l'eau en vue du repentir, mais celui qui vient après moi est bien plus puissant que moi, ...lui, il vous baptisera dans l'Esprit Saint et le feu" (Mt 3,11).

Jean avait accompli sa mission: fini le temps de l'eau... vive le temps de l'Esprit et du feu, le temps de Jésus Sauveur!

Nous y sommes, nous en faisons partie de ce temps, et nous sommes sauveurs dans le Christ.

Merci Jésus, unique Sauveur avec nous, hier, aujourd'hui et à jamais.

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NOTE D'AUTEUR

Le père Ivan Paul est membre la communauté des Pères missionnaires d'Afrique (pères blancs). Il a été missionnaire en Zambie. Il est actuellement à Montréal où il fait de l'animation missionnaire et accompagne plusieurs groupes du Renouveau charismatique.

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