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SSP 15 décembre 1997

REPERES

L'ESPRIT SAINT ET L'OEUVRE DU SALUT

Bernard Lacroix

C'est sur le thème de la famille que je présente mon exposé en quatre points:

- l'entrée dans la famille,

- le salut de la famille divine,

- les bénéficiaires de ce salut,

- quelques façons de profiter tout de suite du salut donné par Dieu.

L'ENTRÉE DANS LA FAMILLE

J'ai eu des parents généreux et attachants. Le sentiment d'être accueilli, aimé, apprécié, pardonné devient une expérience vitale pour tout être humain, que l'on soit enfant ou adulte. Vitale, parce que l'on est alors reconnu comme un être unique avec sa valeur propre. La vie prend un sens lorsque nous nous percevons comme membre d'une famille, d'un groupe, d'une communauté; nous en devenons solidaire.

Il en est ainsi avec la famille divine. Dans nos multiples appartenances à la famille humaine, il arrive que quelqu'un un jour nous présente Dieu. Pour ma part, ce sont mes grands­mères qui, les premières m'ont parlé de Dieu, avec les images et les mots de leur temps.

Qu'un chrétien annonce le Christ, hier ou aujourd'hui, c'est la rencontre du Dieu des chrétiens qui est proposée. Faire l'expérience du Dieu des chrétiens, c'est entrer dans la famille divine, accueillir le salut apporté par Jésus que l'Esprit rend présent pour nous aujourd'hui. Quel salut?

LE SALUT DE LA FAMILLE DIVINE

Pour tout être humain, le salut répond à un besoin précis. Pour celui qui se noie, c'est la bouée de sauvetage. Pour le chômeur, le salut c'est le travail retrouvé. Au delà des besoins immédiats, le salut est aussi la réponse à une aspiration existentielle d'unité, d'harmonie, de plénitude, de réalisation de soi.

L'enfant a besoin de se sentir aimé. L'adolescent a besoin de découvrir un monde où il y a un avenir, d'y trouver une place, d'y vivre en traduisant ses propres aspirations avec ses talents et les dons reçus.

Les malades ont besoin des soignants qui soulagent ou qui guérissent quand c'est possible. Ils ont aussi besoin de présences amicales pour puiser en elles réconfort et courage.

Face aux besoins de l'enfant, de l'adolescent, du malade, du chômeur, nous pouvons tous un jour ou l'autre être des sauveurs.

Mais Dieu, lui, à quel besoin répond-il? Quelle sorte de salut est-il en mesure de nous apporter? Dieu, habituellement ne fait pas de miracle en intervenant au niveau de la nature, de nos relations humaines ou de l'organisation sociale.

Dieu intervient plutôt à l'intérieur de personne, de l'âme, de l'esprit, du coeur. Lorsque nous nous questionnons sur le sens de la vie, du monde et de la société, Dieu fait son offre de salut, en passant par des témoins et parle à notre conscience.

Devant notre désir d'aller au bout de nous-mêmes, l'Esprit nous conduit dans le sillage du Christ. À sa suite, nous trouvons en lui l'énergie pour vaincre nos lourdeurs psychologiques, nos faiblesses morales, notre anémie existentielle.

Devant notre désir d'aimer et d'être aimés, l'Esprit nous met en communion avec la tendresse infinie du Père qui nous adopte pour ses filles et ses fils, nous invitant à voir les autres comme frères et soeurs. Le projet du Père, de rassembler tous les humains autour de la même table, pour les nourrir de la vie nouvelle du Ressuscité.

Voilà le salut que le Dieu de Jésus nous offre et qui peut advenir au monde par nous qui le reconnaissons et le proclamons notre Père.

LES BÉNÉFICIAIRES DU SALUT

L'école polyvalente Émile-Legault à Ville Saint-Laurent accueille des étudiants qui viennent des quatre coins du monde. Cultures, langues, religions s'y coudoient, parfois s'y mêlent. Une éducatrice, Patricia, rassemble depuis plus de 20 ans des jeunes pour vivre les jours Saints sur les pas de Jésus. La surprise c'est de constater que nombre de ceux qui suivent cette retraite ne sont pas chrétiens! D'où la question: À qui Dieu offre-t-il le salut apporté par Jésus-Christ? Lorsque des baptisés témoignent par leur vie de la vie du Père, du Fils et du Saint-Esprit qui les habite, ils sont convaincus que le salut du monde acquis par le Ressuscité passe au monde.

Pourtant entre notre désir et la réalité, l'écart reste énorme. D'abord, sur les six milliards de terriens, moins d'un milliard sont baptisés. Nombre d'entre eux (les tièdes) ont mis au congélateur leur participation à la vie et à la mission de l'Église.

Toutefois, il y a toujours la mystérieuse rencontre de deux libertés. Dieu est toujours libre de faire don de l'Esprit du Ressuscité à qui il veut et quand il veut. Et la réponse à ce don demeure un acte libre et de conséquence lorsqu'il est consenti par un adulte averti. La réponse de Jésus à Nicodème qui demandait comment naître à nouveau: "Il te faut naître d'eau et d'Esprit" et "le vent souffle où il veut", est une réponse qui peut nous inspirer quelques réflexions en saisissant bien qu'il n'a pas dit que l'Esprit ne souffle ni ne soufflera jamais ici où là.

Dieu n'est pas dépendant ni de l'Église ni des baptisés. Il fait don de l'Esprit à tous les humains, parle à leur coeur et leur conscience. Et ceux qui ne connaissent pas le Dieu de Jésus pourront toujours être accueillis dans le Royaume en s'entendant dire: "J'ai eu faim et vous m'avez donné à manger." Tous les gens honnêtes avec leur conscience seront ainsi accueillis.

L'alliance éternelle à laquelle tous les humains sont conviés est annoncée ici-bas par les disciples de Jésus. Ils vivent une seconde naissance, ritualisée dans le sacrement du baptême. Ils naissent "d'eau et d'Esprit", vivent la nouveauté de l'Évangile, se nourrissent de la vie du Ressuscité dans l'Eucharistie, se laissent aimer par le Père. Ils en témoignent en essayant d'aimer et de servir les autres, à la manière de Jésus.

Il faut parfois, souvent, presque toujours toute une vie pour apprendre à renoncer à contrôler sa vie avant de s'abandonner à la volonté de Dieu! Ce n'est que lorsque nous avons compris que le Père du ciel sait mieux que nous ce qu'il nous faut pour réussir notre vie et être heureux, qu'il peut vraiment nous sauver.

QUELQUES FAÇONS DE PROFITER TOUT DE SUITE DU SALUT DONNÉ PAR DIEU

La rencontre de Dieu c'est une expérience spirituelle, le chemin de l'intériorité, l'éveil de sa conscience, l'attention à ce qui bouge au fond de soi. L'Esprit de Dieu niche au plus profond de notre être.

Que se passe-t-il quand l'Esprit du Ressuscité nous fait signe et que nous tendons l'oreille à ses appels?

Entrer dans le salut révélé par Jésus, c'est répondre à l'invitation d'une mystérieuse présence en nous.

Artisan de la communion entre le Père et le Fils au sein de la famille trinitaire, l'Esprit s'offre à développer la communion entre nous et Dieu. Faisant de nous des disciples du Maître, il participe à notre adoption par le Père. Il ouvre le chemin de l'Alliance, fondée sur une confiance totale et réciproque, sur un partage de tout l'être, sur la fidélité affective. Confiance, échange, fidélité, partage absolu du Dieu trine sur lequel il nous greffe.

En fait, Dieu a fait don de la conscience à chacune de ses créatures humaines. Si nous portons attention à cette conscience, voici les avenues qu'il explorera avec nous.

- Recherche de la vérité de ce que nous sommes: identité profonde, personnalité, goûts, talents, qualités, nos défauts, notre faiblesse, notre fragilité, nos questions, nos réponses...

- Recherche de la vérité, du sens de la création, du monde, de la société. Quête de sens poursuivie avec d'autres compagnons dans l'humilité, le partage mais aussi dans la confrontation. L'Esprit reste notre guide intérieur: il éclaire la vie, le monde, la nature et les hommes d'une manière telle que notre esprit humain entre dans une compréhension qui relève de la logique de Dieu.

Renvoyés à la vérité de notre être, nous nous libérons de nos peurs, de nos illusions, de nos prétentions et de nos suffisances.

Dans l'expérience de l'abandon et de la confiance en Dieu lorsque nous nous présentons devant les autres comme croyants et baptisés, le Père et le Fils ayant promis le Paraclet, l'Esprit de Dieu dans sa fonction de conseiller, nous inspirera ce qu'il faut dire ou faire là et quand notre foi subit la confrontation.

Bref, Dieu nous précède dans cette recherche de lui-même. Il met l'Esprit en nous pour nous faire accéder à son salut, ce passage de nos limites à l'infini, du charnel au spirituel, de l'égoïsme au don total, de l'individualisme à la fraternité humaine qui devient la fraternité du Christ dans l'Alliance divine nous rendant cohéritier avec le Christ, du Royaume éternel.


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