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Magazine SELON SA PAROLE (QUÉBEC) traitant de questions reliées à la spiritualité, l'évangélisation, l'éducation de la foi et la vie en Église
Selon Sa Parole 15 février 1999 vol. 25 numéro 2


N'entretenez aucun souci... (Ph 4,6)
Gérard Filion

L'invitation de l'Apôtre Paul à "n'être inquiet de rien" peut, à première vue, surprendre: la vie de tous les jours n'abonde-t-elle pas en légitimes et inévitables soucis et Paul lui-même n'avouait-il pas à ses fidèles de Corinthe son "obsession quotidienne, le souci de toutes les Églises" (2 Co 11,28)? Certes. Essayons tout de même de voir, en l'approfondissant quelque peu, comment son exhortation comporte de toute manière une vérité de vie pour nos fragiles existences et une sagesse apaisante nourrie d'une foi inébranlable dans l'amour d'un Dieu "qui prend soin de nous" (1 Pi 5,7).

BONS ET MAUVAIS SOUCIS

Si le souci, c'est le soin que l'on apporte à l'accomplissement d'un travail ou d'une mission, le Seigneur ne peut qu'approuver cette présence intelligente et active de la personne à ses tâches même les plus ordinaires qui forment la trame de l'existence (Pr 31,10-31; Nt 25,18). Parmi ces préoccupations, la Bible situe en première place le souci des tâches spirituelles: la recherche de la sagesse (Sg 6,17; Ps 62,2), la visée de l'excellence dans la pratique du bien (Tt 3,8), la sollicitude de l'apôtre (2 Co 4,8 ss), etc. Jésus lui-même ne se présente-t-il pas d'ailleurs comme celui qui se donne sans réserve à l'accomplissement de sa mission (Lc 12,50)?

Si le souci du Royaume doit nous habiter, nous savons par expérience que la vie selon les exigences du Royaume dépasse de beaucoup nos lumières et nos forces. C'est ainsi qu'en ce cas le conseil de l'Apôtre trouve son application: les soucis reliés à nos projets spirituels deviennent par eux-mêmes un appel à la foi et à la confiance. Le zèle forcené, la recherche tendue et inquiète - volontarisme - en ce domaine proprement divin ne sont plus l'oeuvre de Dieu et l'intérêt pour sa gloire, mais ils deviennent, sous couleur des meilleures intentions, le désir de réaliser à tout prix des buts personnels, Si élevés soient-ils, et, en définitive, la propension secrète à la recherche de soi. Thérèse de Lisieux nous enseigne une voie différente: la voie sûre de l'abandon à Jésus, qui est "la source de toute sainteté" (1 Th 4,3; He 10,14) et qui seul peut nous hisser au sommet de "la justice, de la paix et de la joie dans l'Esprit Saint" (Rm 14, 17).

LES TRACAS DE LA VIE

Si le souci du travail, de la mission et du Royaume implique la foi et la confiance, qu'advient-il de ce qu'on pourrait appeler les "soucis de ce monde" qui sont sources d'incertitude, de crainte ou même parfois d'angoisse? Notre mode de vie actuel ne favorise-t-il pas l'agitation, la frustration et l'énervement
- un vieux moine résumait le tout en parlant de la noire trinité des trois EEE: encombrement, éparpillement, énervement ? Comment "n'entretenir aucun souci" quand tout nous sollicite, nous assaille, nous inquiète et nous menace: notre santé, notre emploi, l'incertitude de l'avenir, le salut des autres, les séquelles de nos erreurs passées, nos faiblesses psychologiques, nos infirmités spirituelles...? N'y a-t-il pas la de quoi justifier une profonde inquiétude qui peut, en certains cas, déboucher sur une forme de désarroi?

En dehors des situations aiguës, bien des petits tracas et de fréquents ennuis ne viennent-ils pas troubler le déroulement de notre vie quotidienne et perturber la paix profonde de notre coeur? La parole de l'Apôtre: "Ne vous inquiétez de rien" ne semble pas tenir compte de notre fragilité et elle parait sous-estimer les multiples atteintes à notre tranquillité.

LE VÉRITABLE ABANDON

 nous laisser toutefois envahir par les soucis de la vie, graves ou légers, nous ne dépassons guère la mentalité "naturelle" des gens qui n'ont aucune foi en l'amoureuse Providence de Dieu (Nt 6,25-34; Lc 12,22-31) dont la "tendresse est de tous les instants" et qui est "refuge et force au jour de l'angoisse" (Ps 58,17).

Notre foi en la maîtrise de Dieu sur notre vie n'est cependant pas une invitation à la passivité et à la démission de notre liberté; la confiance en Dieu n'implique pas l'annulation de nos pouvoirs naturels. Elle vise à nous faire comprendre que nous ne sommes pas seuls devant la vie, que Dieu est "un secours toujours offert", une force d'appoint et une constante protection et que face aux situations difficiles, nous devrions viser à une certaine sérénité spirituelle, sachant bien que Dieu tire de l'épreuve même notre croissance spirituelle à la mesure de notre abandon à son amour attentif et vigilant.

L'expérience montre que cet amour assidu et délicat s'exerce, souvent de manière manifeste, à l'égard des personnes psychiquement faibles. Si, dans un être humain, la relation à Dieu devient forte et intense, elle va marquer la vie tout entière. Même la personne fragile au plan psychologique tient et va son chemin. Elle boite peut-être, mais elle marche quand même. Plusieurs témoignages pourraient corroborer cette observation.

Dans les cas enfin ou la situation nous échappe totalement (maladie, gestes irréparables, etc.), qu'il y a absence d'issue, blocage, suis-je capable de m'en remettre à Dieu et de vivre en paix? Les résultats d'un tel abandon, sans être magiques, se révèlent parfois rapides, visibles et étonnants.

QUELQUES QUESTIONS

Bref, la vraie question est celle-ci: est-ce que je crois ou non en ce Dieu qui me demande de me décharger sur lui du fardeau de mes soucis (1 Pi 5,7) même s'ils proviennent de mes péchés (Ps 32,5)? Est-ce que je sais me tenir tranquille une fois que j'ai mis ma confiance, accompagnée d'une humble prière, dans la tendresse du Seigneur (Ps 51,10) plutôt que de me laisser assaillir par des inquiétudes qui me plongent dans une ambiance malsaine, défavorable à ma santé physique, psychologique et spirituelle? Est-ce connaître et glorifier Dieu que de vivre sous le signe de la méfiance et de la crainte? Est-ce ainsi qu'on vit une relation avec l'Amour? Donc, tranquillité d'âme, confiance inaltérable, sérénité spirituelle dont Jean XXIII est un si bel exemple. C'est là l'idéal que nous propose l'Apôtre Paul: "N'entretenez aucun souci, mais en tout besoin recourez à l'oraison et à la prière, pénétrées d'action de garces, pour présenter vos requêtes à Dieu. Alors la paix de Dieu, qui surpasse toute intelligence, prendra sous sa garde vos coeurs et vos pensées dans le Christ" (Ph 4,6-7).

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Dernière mise à jour 18 février 1999

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