Page d'accueil | Sommaire | Jubilé | Activités | A retenir | Informations nationales | Informations internationales


Selon Sa Parole 15 octobre 1998 vol. 24 numéro 8

DES TÉMOINS POUR NOTRE TEMPS

FEMME DE TOUTES LES BESOGNES : VIRGINIE FOURNIER (1848-1918)
Ghislaine Cayouette

De nos jours encore, des jeunes et moins jeunes cherchent à orienter leur vie vers quelque chose de beau, de bien, de grand et d'utile.

Cette rubrique souhaite piquer au vif l'intérêt de chacun, et contribuer à la découverte que la sainteté, dans l'Église de Jésus, est aussi un appel pour notre temps.
N.D.L.R.
---------------
J'aimerais vous présenter une femme que je considère réellement comme étant une "sainte" même si elle n'est pas officiellement reconnue comme telle par l'Église. Il s'agit de la fondatrice de la Congrégation à laquelle j'appartiens avec fierté: les Soeurs de Notre-Dame du Perpétuel Secours. Elle se nomme Virginie Fournier (1848-1918) ou encore Mère Saint-Bernard. Il n'est pas facile de résumer son "histoire sainte" en peu de mots. Je ne donnerai ici qu'un faible aperçu de la vie de cette femme qui a su marier de façon merveilleuse "sagesse et charité", à travers une vie souvent cachée mais combien révélatrice de Dieu.

LES VOIES DE DIEU SONT IMPÉNÉTRABLES

Née de parents très chrétiens qui l'ont beaucoup aimée, et ayant grandi dans un milieu relativement aisé, Virginie était dotée d'une nature sensible, généreuse et plutôt "vertueuse", ce qui ne l'a pas empêchée de vivre un cheminement spirituel difficile. Elle incarne bien, à mon avis, le fait que la sanctification passe toujours par la croix, même pour les personnes que la nature semble avoir favorisées davantage, et qui jouissent d'un psychisme en bonne santé.

Dès l'âge de trois ans, elle est menacée de cécité suite à une insolation, mais elle réussit quand même à faire de brillantes études pour devenir enseignante. Son plus grand rêve est de devenir religieuse pour faire "une sainte". Sa première demande d'admission au couvent est refusée à cause de sa vue défaillante. Par deux fois, elle entre au noviciat dans des communautés différentes, mais elle doit revenir dans sa famille pour le même motif. Elle passe alors par bien des chemins: recherche, prière, discernement, doute, épreuves. Le dur combat spirituel qu'elle mène l'oblige alors à préciser ce qu'elle veut par-dessus tout: être fidèle aux inspirations de l'Esprit et à son être profond, en consentant avec amour à faire la volonté de Dieu et non la sienne. Femme de sagesse, elle apprend à obéir mais refuse de subir son destin. Elle s'abandonne à Dieu en toute confiance, sans jamais pour autant démissionner. Elle écrit: "La divine Providence est grande, mais comme ses desseins sont impénétrables!" "Je suis dans sa main." "Le bras de Dieu ne s'est pas raccourci, ni son pouvoir amoindri."

UN OUI SANS RÉSERVE

Sa vocation se clarifie à l'âge de 44 ans, mais toujours de façon déroutante. Cette fois, la voix de Dieu vient de Saint-Damien et passe par un parfait inconnu: le curé Joseph-Onésime Brousseau. C'est une expérience qui la touche au plus haut point. Lors de sa première rencontre avec Virginie, et faisant suite à une lettre qu'il lui avait envoyée, il lui demande "subito presto", de devenir la pierre d'assise de la nouvelle congrégation qu'il a l'intention de fonder. Voyant son hésitation, il lui donne ensuite "deux minutes devant le Saint-Sacrement" pour prononcer le "oui" qui engagera le reste de sa vie. Elle qui avait déjà encaissé deux échecs en vie religieuse, la voilà fondatrice d'une Communauté. C'est toute une surprise venant de l'Esprit-Saint! Jamais elle ne retournera auprès de sa vieille mère dont elle prenait soin à Fall-River (Massachussetts, U.S.A.)

FEMME DE SAGESSE AMOUREUSE ET D'AMOUR TRÈS SAGE

Toute sa vie a été marquée par la simplicité, l'humilité, l'abandon à la Providence, la recherche de la volonté de Dieu et une charité inconditionnelle à l'égard de tous, mais surtout envers "les pauvres, malheureux, abandonnés". Elle était prête à tous pour répondre aux appels de Dieu à travers les tâches les plus ordinaires, oubliant son diplôme d'institutrice et son titre de supérieure ou fondatrice pour donner son lit au plus "pouilleux" des mendiants. "Je suis faite pour toutes les besognes", écrivait-elle à sa soeur. À en juger par les fruits qu'elle a portés, l'Esprit-Saint avait une pleine emprise sur toute sa vie, lui faisant tout accueillir et apprécier comme étant don de Dieu qu'elle se devait de cultiver. "Avec rien et au milieu de rien, il peut et il veut faire quelque chose afin de faire éclater sa puissance et sa gloire."


Amante des fleurs du jardin depuis sa tendre enfance, elle savait faire fleurir l'amour-agapè partout sur son passage, ce qui lui a valu le nom symbolique de "violette de Dieu". Plusieurs auteurs spirituels parlent d'accomplissement spirituel en termes de vie réussie, approfondie et plénière, non pas simplement au sens d'un succès dans la vie (carrière, pouvoir, argent), mais plutôt pour signifier la vie de quelqu'un dont l'histoire personnelle est totalement assumée et intégrée à l'Histoire du Salut, une vie qui porte "du fruit qui demeure".

Cette perfection et cette sainteté sont-elles réservées à une élite seulement? Il semble que non, puisque la grâce de Dieu n'est jamais refusée aux tout-petits et aux humbles de l'Évangile, ni aux coeurs simples qui cherchent Dieu avec droiture et vérité. C'est une voie toujours accessible et cependant jamais facile, puisque tout progrès spirituel est greffé au mystère pascal, et que la résurrection n'arrive qu'au terme d'un chemin de croix. Il faut donc, comme les athlètes, accepter courageusement d'y mettre le prix, nous qui courons pour une "couronne de gloire impérissable".

"Je ne prétends pas que j'aie déjà atteint le but ou que je sois déjà devenu parfait. Mais je continue à avancer pour m'efforcer de saisir le prix de la course, car Jésus-Christ m'a déjà saisi... Non, je ne pense pas avoir déjà obtenu le prix; mais je fais une chose: j'oublie ce qui est derrière moi et m'efforce d'atteindre ce qui est devant moi" (Ph 3,12-13).

CONCLUSION

Dès lors qu'une personne est baptisée, s'ouvre pour elle un "projet spirituel", une nouvelle page d'histoire sainte à écrire sous l'inspiration de l'Esprit-Saint. Mais pour l'écrire, elle doit avoir les qualités de l'écrivain: prêter attention aux événements et aux personnes, de même qu'aux "visites de Dieu", prendre conscience de ce qui es passe et de ce qu'elle vit intérieurement, le juger et l'interpréter, effectuer avec discernement les choix et les décisions qui s'imposent, s'arrêter et s'entraîner régulièrement, pour ensuite laisser toute la place à Dieu, dans une libre adhésion à sa volonté et un grand élan d'amour.

Il en va également du projet spirituel comme d'une grande de semence que Dieu a déposée en nous en même temps que notre "nom" propre, notre vocation. Ce projet demande à être cultivé, arrosé, "sarclé" et "engraissé" pour arriver à produire les fleurs de l'union à Dieu et les fruits de la charité (mission). Ce qui ne pousse pas sèche et meurt. Qui n'avance pas recule.

Il est donc essentiel de conserver à la vie spirituelle son caractère dynamique, qui lance et relance continuellement en avant. On ne peut vire "en amour" avec celui qui est le "vivant à jamais", sans cultiver l'attention à sa présence et sans accepter de marcher en perpétuelle tension vers celui qui donnes sens à tout projet spirituel puisqu'il en est le but ultime: l'éternel et parfait amour.
- 30 -

NOTE D'AUTEUR

Membre de la Congrégation des Soeurs de Saint-Damien de Bellechasse, Soeur Ghislaine Cayouette fait actuellement des études en théologie à l'Université Laval à Québec


Retour à la page d'accueil

Dernière mise à jour 15 octobre 1998

Page d'accueil | Sommaire | Jubilé | Activités | A retenir | Informations nationales | Informations internationales