Nouvelles des États généraux
RÉFLEXIONS SUR LES SUITES À DONNER
Monique Anctil


Ayant une longue expérience auprès des groupes du Renouveau charismatique, vous me permettrez de vous faire part de mes intuitions profondes face à cette abondante source jaillie des États généraux.
Plusieurs questions : Comment retrouver le feu des débuts ? Comment redonner du souffle au Renouveau charismatique ? Comment laisser agir l'Esprit avec puissance ? Comment renouveler nos groupes ? J'ose croire que déjà des réponses sont montées en votre cœur !
Au Congrès International de Rimini en avril dernier, le père Raniero Cantalamessa présenta le récit des disciples d'Emmaüs (Lc 24, 13-35) comme une parabole pour le Renouveau charismatique dont l'état d'âme ressemble, à certains égards, à celui des deux disciples en route vers Emmaüs. Nous espérions que le Renouveau charismatique apporte tellement à l'Église. Nous avions si fortement cru à cette vie nouvelle apportée par l'Esprit saint et expérimentée à travers l'effusion de l'Esprit. Et pourtant ! Les difficultés de relations réapparaissent, les charismes n'ont pas éclaté ou ne sont pas reconnus, la Parole de Dieu, si puissante au début, semble porter si peu de fruits...
Comme les disciples, découragés, un peu désespérés, nous sommes tentés de retourner à la maison en nous disant : " À quoi bon ramer à contre courant ! " Mais aujourd'hui, Jésus se présente à nous. Il veut nous guérir, pour que nous retournions à Jérusalem - dans nos groupes, dans nos milieux - proclamer la Bonne Nouvelle. Nous devons retrouver le goût de la Parole de Dieu qui donne sens à notre vie. " Parle, Seigneur, tu as les paroles de la vie éternelle ! " Demandons à Jésus de nous parler et nous adresser une parole de vie, de consolation, de guérison... Demandons-lui davantage de paroles que de signes !
Si nous désirons retrouver le feu des débuts, c'est précisément parce que le feu ne nous brûle plus ou presque plus. Qu'est-ce qui nous enflammait au tout début ? N'était-ce pas la nouveauté de ce que nous vivions ? Et d'où provenait cette nouveauté ? De l'expérience de l'effusion de l'Esprit qui transformait notre vie et nous permettait de choisir radicalement Jésus, comme l'Unique Seigneur et l'Unique Sauveur de nos vies.
Si nous désirons être brûlés à nouveau, il nous faut revenir à la grâce de conversion expérimentée à travers l'effusion de l'Esprit et y demeurer fidèles. Il nous faut entretenir la grâce de l'effusion de l'Esprit, la grâce de Pentecôte. Nous avons peut-être manqué de vigilance dans notre marche vers la sainteté, dans une vie ascétique et mystique profonde. Nous avons peut-être manqué de courage pour prendre radicalement le chemin exigeant de la vie charismatique qui est celui d'une remise totale de tout notre être à l'Esprit saint. Comme le disait le père Cantalamessa, le slogan du Renouveau charismatique est : " Boire avec joie à la sobre ivresse de l'Esprit ! " Sommes-nous ces assoiffés qui demeurent tendus vers la source qu'est l'Esprit saint ?
Il ne faudrait pas que se vérifie dans notre vie, le reproche de Paul aux gens de Galatie : " Ô Galates sans intelligence, qui vous a ensorcelés ? À vos yeux pourtant ont été dépeints les traits de Jésus Christ en croix. Je ne veux savoir de vous qu'une chose : est-ce pour avoir pratiqué la loi que vous avez reçu l'Esprit, ou pour avoir cru à la prédication (à la Parole) ? Êtes-vous à ce point dépourvus d'intelligence, que de commencer par l'esprit pour finir maintenant dans la chair ? Est-ce en vain que vous avez éprouvés tant de faveurs ? Et ce serait bel et bien en vain. Celui donc qui vous prodigue l'Esprit et opère parmi vous des miracles, le fait-il parce que vous pratiquez la loi ou parce que vous croyez à la prédication ? " (3, 1-5).
Pour raviver la flamme, il nous faut retrouver notre véritable identité. Pour mieux nous faire accepter, nous avons cessé de parler de " Renouveau charismatique ". Parce que le mot faisait peur, on a simplifié en s'appelant tout simplement " groupes de prière ". Cela faisait moins peur mais nous avons ainsi nivelé le Renouveau par la base !
Et nous avons oublié de transmettre l'héritage charismatique. Les plus anciens, comme moi, qui avons connu le Renouveau dans ses tout débuts, nous avons oublié de transmettre ce que nous avons reçu : l'esprit et la spiritualité de cette grâce de Pentecôte. Les nouveaux venus nous ont pris là où nous étions rendus et nous ne leur avons pas transmis la flamme des débuts. Il nous faut revenir aux grandes caractéristiques du Renouveau et les faire connaître aux autres. Il nous faut offrir aux nouveaux venus et même aux plus anciens les Séminaires de la Vie Nouvelle dans l'Esprit, des sessions de formation et de ressourcement, Selon sa Parole...
Ici, je pense qu'il faut nous interroger sur la qualité du ressourcement et de la formation que nous nous donnons et que nous offrons à nos gens. D'abord, est-ce que nous en prenons nous-mêmes et est-ce que nous en organisons pour nos gens : sur le cheminement personnel, sur la vie dans l'Esprit, sur la prière, les charismes, les caractéristiques de nos assemblées charismatiques... ? Tout cela pour grandir dans les voies de l'Esprit.
Et comment redonner du souffle au Renouveau charismatique ?
Est-ce à dire que le Renouveau vit une période d'essoufflement ? Quelles en sont les causes ? Ne serait-ce pas qu'ayant acquis une certaine expérience, on a aussi pris beaucoup d'assurance et l'on n'oublie de s'en remettre totalement à l'Esprit saint ; à lui donner toute la place dans l'animation, l'enseignement, dans l'exercice des différents ministères ? Plus sûrs de nous-mêmes, nous mettons moins de temps à préparer nos rencontres par la prière, la réflexion, le jeûne... Sommes-nous emprisonnés dans nos structures sécurisantes qui empêchent toute spontanéité dans l'Esprit ?
De plus, avons-nous eu le souci de former d'autres personnes, des plus jeunes qui, selon leurs dons et charismes, pourraient assurer la relève ?
Le récit d'Emmaüs est une prophétie pour nous ; il est une invitation à retrouver l'enthousiasme, à reconstruire, à nous laisser agir dans la puissance de l'Esprit saint. Donnons-Lui la chance d'agir puissamment en nous et par nous dans nos communautés de foi en priant comme des mendiants.
Nous avons cessé de nous émerveiller et alors la louange a pris de moins en moins de place. Les Mais oui le Seigneur est bon, Il a fait merveille, Je te dis que si tu crois, tu verras la gloire de Dieu, Je t'exalte ô Roi mon Dieu qui suscitaient la louange et portaient la guérison et la libération ont été moins présents. Le signe évident du passage du Souffle de l'Esprit dans un groupe, c'est la joie, l'exultation, c'est le visage nouveau qui reflète celui du Ressuscité. Comme il est important d'être des témoins joyeux. Que les autres en nous voyant puissent dire : " Voyez comme ils s'aiment ! Voyez la joie qui les anime ! Il doit se passer quelque chose de beau, là ! " et ils viendront voir. Rappelons le texte du récit de la Pentecôte. De quoi étaient stupéfaits les témoins de la Pentecôte ? De ce qu'ils entendaient publier les merveilles de Dieu. Et ils disaient : " Que peut bien être cela ? " (Ac 2, 12).
Comment laisser agir l'Esprit avec puissance ?
En lui donnant toute la place. En le mettant sur la ligne de front dans toutes nos activités. En faisant de nos groupes des communautés de foi qui se mettent sous la mouvance de l'Esprit saint et en croyant que chacune de nos assemblées de prière est le lieu où nous pouvons vivre une " petite Pentecôte ". En accueillant dans l'humilité et la charité les charismes que l'Esprit distribue avec générosité et tant de gratuité. Nous n'avons pas le droit de priver l'Église, nos groupes et mouvements ecclésiaux, des charismes variés que l'Esprit saint donne car ils sont nécessaires pour la croissance de l'Église.
Il faut se rappeler que les gens allaient à Jésus pour deux raisons : pour l'entendre et pour être guéris. Ils viennent aux groupes du Renouveau charismatique pour les deux mêmes raisons : écouter la Parole de Dieu et être guéris et cela dans la puissance de l'Esprit. Que leur offrons-nous ? Leur donnons-nous la bonne nourriture de la Parole de Dieu et leur offrons-nous la prière avec imposition des mains qui est un ministère de compassion, de guérison et de libération où le Seigneur peut agir aujourd'hui dans la puissance de son Esprit saint. Croyons-nous que Jésus est aussi présent dans sa Parole qu'Il l'est dans son Eucharistie ? Nous pouvons adorer Jésus présent dans le Saint-Sacrement et dans nos soirées du Renouveau charismatique, nous adorons Jésus présent dans sa Parole et dans nos frères et sœurs. Ça m'amène ici à rappeler l'importance de l'accueil, particulièrement au début des soirées. C'est souvent le lieu où nous recevons les confidences des gens et là nous pouvons les inviter au ministère de guérison et de libération par la prière avec imposition des mains.
Pour que nos groupes soient renouvelés, avons-nous l'audace d'inviter des parents, des amis, des gens qui nous présentent leurs besoins... à se joindre à nous ? Et pour qu'ils ne soient pas déçus, pour qu'ils soient bien avec eux-mêmes et nous, accueillons-les avec tendresse, comme ils sont. Servons-leur la bonne nourriture de la Parole, une Parole de salut, de consolation et de guérison.
Si nous n'offrons pas aux gens ce qu'ils attendent, nous ne sommes pas honnêtes envers eux et ils iront chercher ailleurs. Je pense qu'on a vécu une dure période d'éparpillement. Beaucoup de groupes n'ont pas été fidèles à la Parole de Dieu, à la Parole proclamée et enseignée, à la Parole priée et vécue. Ils ont remplacé la Parole par des écrits de révélations privées ou autres. D'autres ont cru bien faire en remplaçant la dimension charismatique par toutes sortes de dévotions : la récitation du chapelet, l'adoration, etc. ; ce qui est bon et même très bon. Mais ce n'est pas le lieu. Ne serait-ce pas l'astuce du Malin pour nous détourner de l'essence même du Renouveau ? Oui, il est urgent de revenir aux grandes caractéristiques du Renouveau, sinon nous assisterons à sa mort prochaine !
Une autre dimension tellement importante, je dirais précieuse et essentielle pour que le Renouveau charismatique retrouve sa vigueur, c'est de vivre le plus radicalement possible le commandement de l'amour. Les derniers moments de Jésus avec ses apôtres n'ont pas été employés à leur donner des conseils sur la façon de structurer l'Église naissante. Il avait un enseignement beaucoup plus fondamental à leur transmettre : " Demeurez dans mon amour ! " " Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés ! " " Il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie ! " Voilà : le SERVICE DANS L'AMOUR ! C'est à cela que nous sommes invités. Et saint Paul nous propose un sérieux examen de conscience sur l'amour dans sa première lettre aux Corinthiens, au chapitre 13. Si l'amour se vit dans nos groupes, amour qui est absence de critiques, de jalousies, de préjugés, de comparaisons, d'envies, de rancunes, l'Esprit saint agira avec puissance.
Au Congrès National de Granby auquel plusieurs d'entre vous avez participé, nous avons vu de beaux fruits du Renouveau charismatique : les communautés nouvelles, les centres de prière, les grands leaders qui nous ont précédés, les œuvres multiples et diversifiées, les groupes de musiciens... Lorsque l'Esprit saint s'est manifesté dans les années 67 et 72-73, les gens touchés par la grâce de Pentecôte ont senti le besoin très fort de se rassembler en petites communautés pour écouter et prier la Parole de Dieu et se livrer davantage à l'Esprit saint. Ce fut le début des groupes du Renouveau d'où ont jailli les beaux fruits que je viens d'énumérer. Les groupes, si petits soient-ils, sont nécessaires voire indispensables pour la vie de l'Église et il faut prier afin que chaque paroisse ait son groupe charismatique.
Le Renouveau charismatique se voit comme une œuvre de l'Esprit saint en réponse aux besoins spirituels de notre temps. Le bon pape Jean XXIII demandait à tous les fidèles de prier pour une nouvelle " effusion de l'Esprit " de Pentecôte en préparation au concile Vatican II. Plusieurs années plus tard, Paul VI affirmait : " Plus d'une fois, nous nous sommes demandé quels sont les plus grands besoins de l'Église, quel est le besoin primordial et ultime de l'Église ? Ce besoin, c'est l'Esprit. L'Église a besoin de mots sur ses lèvres, d'une vision prophétique... Plus que jamais, l'Église et le monde ont besoin que le miracle de la Pentecôte se continue dans l'histoire ". Bien sûr, le Renouveau charismatique n'a pas le monopole de l'Esprit saint, mais nous avons la responsabilité de permettre à la grâce de Pentecôte manifestée à travers l'effusion de l'Esprit, grâce qui renouvelle celle du baptême, de se répandre dans l'Église. Nous en avons la mission !
Avons-nous de l'espérance en l'avenir du Renouveau charismatique ? Croyons-nous que l'Esprit saint a encore quelque chose de beau et de grand à faire avec nous et avec le Renouveau ? Alors, il ne faudrait jamais entendre des propos désespérants comme celui-ci : " Le Renouveau charismatique a peut être fait son temps ! " La Pentecôte a-t-elle fait son temps ? La Pentecôte et le Renouveau charismatique, grâce de Pentecôte, seront présents dans l'Église jusqu'au jour où l'Église entière, en tous ses membres, vivra sous le souffle puissant de l'Esprit saint, où l'Église entière sera charismatique !
Gardons bien vivante la flamme de la Pentecôte et transmettons-la avec audace pour que s'épanouisse, dans l'Église d'aujourd'hui, la grâce du Renouveau charismatique !


Magazine SELON SA PAROLE (QUÉBEC) traitant de questions reliées à la spiritualité, l'évangélisation, l'éducation de la foi et la vie en Église
Selon Sa Parole janvier-février 2001 vol. 27 numéro 1


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Dernière mise à jour 8 février 2001

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